Brexit : le marché britannique « restera très attractif »
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Malgré sa sortie de l’Union Européenne (UE), le Royaume-Uni restera un marché « très attractif » pour les entreprises du continent, estime Raphaël Tirat, qui dirige à Londres l’antenne du cabinet de conseil français Expandys. Le Royaume-Uni reste le 1er excédent commercial de la France en Europe. C’est donc un partenaire stratégique au vu de la balance commerciale et sur bien d’autres points.
A quelques jours du Brexit, dans quel état d’esprit abordez-vous ce changement majeur ?
« Tout changement crée des opportunités (…) Les économistes se sont beaucoup trompés depuis le référendum (en juin 2016). Il y a une tendance à dramatiser et à vouloir faire peur. Mais, quoiqu’il arrive, le Royaume Uni restera la 2ème ou 3ème économie européenne selon les secteurs. C’est une économie très avancée, avec un fort potentiel. Cela perdurera quoi qu’il advienne. Le marché reste très attractif et le restera (…) Pratiquement la moitié du commerce du Royaume-Uni, en importations comme en exportations, se fait avec l’Union Européenne (UE). Cela ne va pas changer. Je pense qu’un accord de libre échange (ALE) peut être négocié d’ici la fin 2020 car, entre le Royaume-Uni et l’UE, on ne part pas de rien, on a déjà une large base commune. Le sujet des normes sera majeur. Est-ce que les Britanniques conserveront les normes européennes, est-ce qu’ils créeront leurs propres normes ou est-ce qu’ils vont chercher à se rapprocher des normes des Etats-Unis? De toute façon, il est très probable que, tant le Royaume Uni que l’Union Européenne, seront flexibles sur les modalités d’importation des biens et services dans un premier temps. »
Quels sont les secteurs porteurs pour des exportations vers le Royaume Uni?
« L’alimentaire au sens large, le médical, tout ce qui concerne les start-up, le commerce par internet, la recherche et développement, l’équipement et l’aménagement d’intérieurs, la mode et le textile…Le marché alimentaire sera toujours une opportunité. Le taux d’auto-suffisance du Royaume-Uni est globalement de 60% sur les produits agro-alimentaires, selon le DEFRA (Department of Environmental, Food and Rural Affairs), l’équivalent du ministère de l’Agriculture. En matière agricole, les pays européens (Pays-Bas, Irlande, France et Allemagne en tête) sont les principaux exportateurs mais aussi les principaux clients (avec également les Etats-Unis) de la Grande-Bretagne. Dans tous les scénarios, on s’attend à des changements majeurs dans le secteur agricole britannique qui va devenir plus ouvert et plus exposé à la concurrence (…) La Grande-Bretagne étant hors de l’UE, la PAC (Politique Agricole Commune) ne va plus s’appliquer, c’est la fin des subventions européennes aux agriculteurs britanniques. »
Face au Brexit, quels conseils donneriez-vous aux entreprises françaises qui exportent ou veulent exporter vers le Royaume-Uni?
« Le Royaume-Uni est un marché à fort potentiel mais assez exigeant, qu’il s’agisse du suivi, des services. Il faut fournir le bon produit mais aussi tout ce qu’il y a autour. Certaines entreprises n’ont pas nécessairement le bon niveau de performance. Je vois certaines entreprises qui décident de quitter le Royaume-Uni. Dans ce cas, le Brexit est l’élément déclencheur, mais c’est un peu l’arbre qui cache la forêt. Établir des partenariats avec des entreprises britanniques (…) me semble indispensable. Dans ce cas, tout le monde est intéressé à la bonne marche de l’affaire et l’implication est plus importante (…) Déjà, prendre un distributeur sur place, c’est une bonne façon de tester le marché. Ensuite, on peut aussi envisager une filiale, ou une joint venture. Bien sûr, il faudra s’adapter mais la vraie question est, comme toujours, de bien étudier le marché qui a son propre mode de fonctionnement. On se leurre en pensant que, pour y faire des affaires, il suffit de parler anglais ou que c’est un pays proche » souligne Raphaël Tirat, Directeur UK du cabinet de conseil français Expandys.
(Propos recueillis par Clarisse Lucas du bureau AFP à Rennes, le 28 jan 2020)